Comprendre Les Différentes Régions Africaines.
L’Afrique est un continent d’une exceptionnelle diversité. On s’attarde beaucoup sur la différence entre les systèmes de gouvernement des anciennes colonies françaises et britanniques, mais ce n’est qu’une première couche de diversité. Parmi les 54 pays, l’Afrique compte six langues officielles héritées de son passé colonial et des migrations islamiques.
En plus de ces langues, on compte des centaines de groupes ethnolinguistiques et tribaux, qui, pour beaucoup, ne coïncident pas avec les frontières nationales. L’Afrique connaît, à côté de ces différences tribales, une grande diversité religieuse. Les monothéismes et les croyances traditionnelles y jouent un rôle aussi significatif les uns que les autres.
Appréhender l’Afrique comme un tout indifférencié, c’est l’aborder à ses risques et périls. Bharat Thakrar de Scangroup devient blême quand il pense aux erreurs des multinationales qui se contentent d’une approche marketing unique pour toute l’Afrique :
« Pourquoi les entreprises étrangères commettent-elles, vis-à-vis de l’Afrique, une erreur qu’elles ne feraient jamais ailleurs ?
Il faut pouvoir s’adresser aux consommateurs dans une langue qu’ils comprennent. Quand vous allez en Europe, est-ce que vous la considérez comme un seul marché ? Vous savez bien que les Italiens sont très différents des Espagnols, et les Espagnols très différents des Français : vous n’allez pas concevoir la même ligne de communication pour tous. Ils le font en Afrique parce qu’ils prennent les Africains pour des imbéciles. Un Tanzanien va regarder une publicité et dire: « Je ne me reconnais pas là-dedans. Là il y a un Kenyan, là il y a un Sud-Africain : ce n’est pas pour moi. » Comme votre communication ne les touche pas, ils n’achètent pas votre produit.»
Les Africains ont l’habitude de voir dépeindre leur continent d’un seul coup de pinceau. Cette tendance a assombri les débuts du décollage de l’Afrique, notamment quand le pinceau était trempé dans le sang.
Sam Jonah a vécu cela de près en levant des fonds pour Anglo-Gold Ashanti. En 1996, Sam est venu à New York pour présenter l’entreprise à des investisseurs américains. Sam était le PDG de la plus grande compagnie minière du monde, avec des coûts de structure réduits et des perspectives de vente de son produit à un prix intéressant. Il venait de faire coter sa société à Wall Street, une première pour une entreprise africaine. Son voyage devait être une visite de routine pour faire suite à l’introduction en bourse. En définitive, il n’y eut rien de routinier. La même semaine, le génocide rwandais inondait les écrans d’images de rivières africaines débordant de cadavres, et de visages africains déformés par la haine. Les informations donnaient à voir un monstrueux film d’horreur émergeant en temps réel.
Sam a compris que ce qui était en train de se passer au Rwanda aurait des retombées sur son entreprise et sur son pays: « La plupart des investisseurs à l’époque pensaient que l’Afrique était un pays, un seul pays. Quand nous faisions notre tournée pour l’introduction en bourse, nous avions beau répéter aux investisseurs que nos activités étaient au Ghana, ils pensaient que nous étions en Guyane ou en Guinée. Et quand on a commencé à entendre parler du Rwanda sur les ondes, j’ai su que nous étions dans une mauvaise passe. Le Rwanda, c’était nous tous. »
Sam a passé sa vie à tâcher de dissocier son entreprise et l’Afrique de ce genre d’images. Il est né dans la ville où Ashanti Goldfields (qui est devenu AngloGold Ashanti) exploitait la plus importante de ses mines. Il a grandi à l’ombre de la mine. Son père était sous-traitant, et a réussi à faire suffisamment grandir son entreprise pour envoyer ses fils à l’école au Ghana. Contre le souhait de ses parents, Sam a choisi de travailler à la mine, où il a attiré l’attention du manager. Celui-ci l’a recommandé pour une bourse d’études financée par l’entreprise, lui permettant de passer un diplôme d’exploitation minière au Royaume-Uni. De retour à Ashanti, il a grimpé les échelons jusqu’à des niveaux que peu d’Africains avaient atteints. En 1986, à l’âge de 36 ans, il est devenu le premier PDG noir de l’entreprise, et le plus jeune de son histoire. En 1995, il est parvenu à faire coter l’entreprise à Wall Street …
Ce texte est un extrait du livre « Ces Entreprises qui Réunissent En Afrique » écrit par JONATHAN BERMAN.
Nous vous invitons à lire l’article suivant « PENSER RÉGIONS« .
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