Après avoir fait le deuil de notre père, ma mère, qui était déjà une servante de Dieu très engagée dans son Église locale, décida de confier son fardeau à son Seigneur. Étant convaincue qu’avec Dieu, tout était possible, elle essuya ses larmes, retroussa ses manches et se mit de nouveau au travail. Ma mère était consciente du fait qu’elle devait se concentrer sur ses dons et talents pour pouvoir trouver de l’argent sans se compromettre. Elle associa travail acharné, discipline, bonne gestion des ressources et générosité pour réaliser son projet qui consistait à donner une bonne éducation à ses enfants et les aider à sortir du Ghetto, mentalement et physiquement. Elle commençait ses journées très tôt par un temps de prière. 

Ensuite, elle faisait le ménage avant d’aller au marché acheter les aliments qu’elle cuisinerait en journée afin d’assurer ses ventes en début de soirée. Sur son stand de nourriture qu’elle montait et démontait chaque soir, elle exposait des mets, avec pour seul éclairage une lampe tempête. Elle rentrait tard le soir, faisait sa comptabilité, encourageait ses enfants. Elle priait ensuite avec ceux qui étaient éveillés pour rendre grâce à Dieu pour la journée. 

Alors, elle pouvait enfin se préparer pour dormir. La discipline, l’intégrité, la diligence et surtout la foi de ma mère lui permirent de continuer à financer les études de tous ses enfants. Ma mère savait qu’elle avait un défi de taille à relever et elle savait aussi qu’elle ne pourrait compter sur personne sur cette Terre pour l’épauler. Elle saisissait toutes les opportunités que Dieu lui donnait et travaillait durement. 

Cette femme vertueuse se réveillait très tôt tous les matins et se couchait très tard la nuit après avoir été active sans interruption. Elle ne se plaignait pas, elle ne blâmait pas et elle ne jugeait pas les autres. Elle rendait grâces en toutes choses et elle confessait régulièrement que le meilleur était à venir. Je savais qu’elle était triste et mélancolique, mais elle faisait de son mieux pour ne pas le montrer parce que ce n’était pas ce qu’elle voulait communiquer. 

Ma mère manifestait de la générosité envers tout le monde. Elle donnait à manger à ceux qui étaient encore plus dans le besoin que nous. Elle prenait soin des grandes mères qui étaient délaissées et elle nous apprit à faire pareillement. Après la mort de mon père, ma mère ne put plus compter sur les membres de la famille. Ses deux sœurs, Philomène et Adèle, arrivaient elles-mêmes à peine à joindre les deux bouts. Du côté paternel, j’avais toutefois un oncle du nom de Benoît, frère aîné de mon père et lui-même père de six enfants. Mon oncle Benoît travaillait comme salarié dans une société de transport urbain. Son salaire lui permettait juste de prendre soin de ses six enfants. 

En dehors de lui, mon père avait également deux grands neveux, tous deux fils de son frère aîné. Ces grands neveux vivaient au village avec ma grand-mère paternelle. Par conséquent, la seule personne de toute la famille encore en vie et disposant d’un revenu était l’oncle Benoît. Malgré cela, il ne manifesta jamais le désir de veiller sur les enfants de son frère. 

Non seulement il ne fit jamais de dons financiers à ma mère à notre attention, mais il ne se donna jamais la peine de nous rendre visite afin de prendre de nos nouvelles. Ma mère devait donc se fortifier seule et prendre courage. 

J’ai dû fouiller les décharges d’ordures.

Ma mère s’était demandé comment est-ce qu’elle pourrait générer des revenus dans sa situation. Pendant qu’elle méditait sur cette question, elle s’était souvenue que plusieurs éloges qu’elle recevait de la part de son mari et ses enfants étaient à propos de ses compétences culinaires. Elle avait un don particulier pour la cuisine régionale. Tout ce qu’elle faisait comme mets était délicieux. 

Elle entreprit de cuisiner et de commercialiser des gâteaux de pistache (ou gâteaux de graines de courge), des gâteaux de haricot blanc, des bâtons de manioc et du poisson épicé cuit dans des feuilles. Le gâteau de pistache est un mets délicieux qui demande un grand niveau de patience et d’exigence pour sa préparation. Les ingrédients de base pour la préparation de ce mets sont les pistaches et le poisson fumé. Ma mère écrasait les pistaches qu’elle avait décortiquées et séchées au préalable. 

La pâte qu’elle obtenait était précieusement emballée dans des feuilles de bananier qu’elle faisait ensuite cuire à la vapeur dans une marmite pendant au moins deux heures. Pour la préparation des gâteaux de haricots blancs, ma mère utilisait des boites de conserve usagées comme moules ; des boîtes métalliques de divers volumes, lavées puis stérilisées dans de l’eau bouillante avant emploi. 

Le seul endroit où l’on pouvait en trouver était dans les décharges d’ordures. Quelqu’un devait y aller et fouiller pendant des heures pour pouvoir ravitailler maman. Aucun de mes frères et sœurs n’était disposé à faire cette besogne ; son caractère dégradant ne stimulait personne à s’y engager. Lorsque ma mère s’aperçut qu’il n’y avait pas de volontaire, elle dut désigner un émissaire parmi ses six enfants. Pour cette mission périlleuse et très humiliante, le sort tomba sur moi et je ne pus contester car j’étais le benjamin de la famille. 

Deux fois par semaine, je faisais le tour de mon quartier et des quartiers voisins à la recherche des boîtes de conserves vides. Je sillonnais les rues sous la chaleur et

Ce texte est un extrait du livre  » DU GHETTO AU BARREAU  » écrit par Dominique MBOG.
Nous vous invitons à lire l’article suivant “ Entre Richesse Et Pauvreté “.

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